Les gouvernements, les commerçants et les réseaux sociaux élaborent des scénarios divers et variés concernant les possibilités offertes par l’omniprésence de la reconnaissance faciale, une technologie qui a quitté le domaine de la fiction et l’univers d’Hollywood (les romans de George Orwell, Mission Impossible, Bourne Ultimatum, Minority Report ou Matrix Reloaded) pour arriver dans notre vie quotidienne.
Il existe les applications et les outils qui “suggèrent” l’identité d’une personne donnée, allant de “qui est l’acteur à l’écran ? “, à la possibilité beaucoup plus problématique et franchement effrayante de recueillir des informations sur l’étranger à l’autre bout du wagon dans le métro, et ce en utilisant une application sur mon smartphone.
Aucun pays n’a plus de succès dans l’adoption des technologies basées sur la reconnaissance faciale que la Chine, ce qui n’est pas trop surprenant compte tenu des années d’intrusion autoritaire dans la vie du citoyen chinois.
Les résidents chinois trouvent-ils vraiment les capacités offertes par la reconnaissance faciale utiles ? Oui, absolument, car il existe peu de réticence compte tenu du point de vue très différent vis-à-vis de la vie privée qui existe en Chine. Le Technology Review d’avril/mai 2017 du MIT a montré la multitude de façons dont la reconnaissance faciale était utilisée en Chine.
- S’assurer que le conducteur au volant du véhicule de location que vous êtes sur le point de prendre, est le bon.
- Récupérer vos billets de train en montrant votre visage.
- Visiter des attractions touristiques sans avoir besoin d’un ticket avec votre visage permettant de vous authentifier.
- Déambuler dans un commerce où vous êtes salué par votre nom.
Et qui peut oublier le succès de l’application chinoise, Baby Come Home, conçue pour connecter les enfants disparus avec leurs parents ? Cette technologie, créée avec Microsoft, a réuni un père avec son enfant, qui avait disparu depuis quatre ans.
Mais la Chine n’est le seul pays à avoir adopté cette technologie avec succès, il en existe d’autres bien sûr, et plusieurs d’ailleurs où son utilisation n’est pas plébiscitée par la population.
Vous êtes fan de football ? A l’occasion de la finale de la Ligue des champions au Royaume-Uni au début du mois de juin 2017, l’autorisation avait été donnée de scanner des visages au stade et à la gare centrale, un cas de figure élaboré afin de permettre un examen en temps réel de personnes inconnues et leurs identifications avec une base de données d’individus connus, et vraisemblablement des “bad guys”.
Le NIST des États-Unis, en collaboration avec le Department of Homeland Security, a mené un projet sur plusieurs années intitulé Face in Video Evaluation (FIVE). Le but du projet était de déterminer si les algorithmes pouvaient “correctement identifier ou ignorer des personnes apparaissant sur des séquences vidéo”. Les scénarios sélectionnés comprenaient le screening de lieux à très forte fréquentation, le screening médico-légal (scène du crime), l’analyse de vidéo criminelle (comme la vidéo d’un hold-up dans une banque), la vidéoconférence et les personnes apparaissant dans des séquences vidéo (télévision).
Vous volez beaucoup ? Les aéroports du monde entier utilisent la reconnaissance faciale depuis un certain nombre d’années maintenant (Brésil, Émirats arabes unis et États-Unis), mais récemment nous avons vu des compagnies aériennes utiliser cette technologie dans certains cas de figure. En effet, Jet Blue et Delta expérimentent tous deux la reconnaissance faciale : Jet Blue dans le cadre du processus d’embarquement, et Delta pour que les passagers vérifient eux-mêmes leurs bagages.
Ensuite, il existe cette société norvégienne de signalisation numérique, ProntoTV, qui a collecté de manière furtive des données sur les visiteurs dans les locaux de ses clients. Le logiciel, utilisant l’intelligence artificielle, a fourni des données sur les individus au sein de la “plage de balayage”.
Ce qui est acceptable en Chine peut ne pas l’être aux États-Unis, comme l’a appris le FBI. En mai 2016, le FBI a été recadré vis-à-vis du E-Government Act de 2008 qui oblige les organismes gouvernementaux à publier une “évaluation de l’impact sur la vie privée” au fur et à mesure du déploiement de leur système photo d’identification inter-états de nouvelle génération (NGI-IPS).
Le FBI et ses équipes d’analyse d’image ont attiré la censure du Government Accounting Office américains, qui a considéré que l’évaluation de cette technologie de manière appropriée avait échoué, en émettant six recommandations auprès du FBI. Ces dernières comprenaient la conduite de l’évaluation de l’impact sur la vie privée, l’amélioration de la transparence, la réalisation d’audits sur l’utilisation de la capacité NGI-IPS par les services de police, la réalisation de tests sur l’exactitude des technologies NGI-IPS, la réalisation d’un examen annuel du NGI-IPS et la détermination si chacun des systèmes utilisés par le FBI était suffisamment précis.
Le FBI était en désaccord avec certaines recommandations, mais d’accord avec la plupart, et s’est ensuite remis au travail, pour n’être appelé par la Chambre des représentants qu’en mars 2017, pour plusieurs problèmes récurrents soulignés par le GAO.
Les réseaux sociaux et les moteurs de recherche nous ont montré les résultats de leurs algorithmes de différentes façons. Les utilisateurs de Facebook peuvent étiqueter des individus sur des photos, et avec chaque étiquette, une autre pièce du puzzle de la reconnaissance faciale est fournie à Facebook. Le résultat : Facebook peut maintenant suggérer des individus pour l’étiquetage lorsque vous partagez des photos.
Est-ce que Facebook est seul ? Non. Snapchat a créé un léger remous parmi les défenseurs de la vie privée l’année dernière lorsqu’il a déposé un brevet concernant “un appareil et une méthode pour la protection de la vie privée automatisée dans les images partagées“, en d’autres termes, adapter automatiquement les paramètres de confidentialité à une image correspondant à celle d’un utilisateur Snapchat.
La reconnaissance faciale est-elle assez fiable ?
Nous y arrivons à présent.
En mars 2017, le NIST a publié les résultats de son projet portant sur la reconnaissance faciale de sujets non coopératifs. Les résultats sans doute pas vraiment surprenants : la reconnaissance faciale est difficile à effectuer, et aucune des technologies utilisées n’a “atteint des performances élevées”. Il a ajouté que les alertes lancées sur des candidats par des systèmes et des humains contenaient des erreurs et que “les taux globaux du système hybride machine-humain doivent être bien compris et intégrés en conséquence”.
En d’autres termes, des faux positifs et des ratés se produiront. Pour augmenter la probabilité que le système hybride machine-humain augmente sa précision, peut-être que la solution consiste à employer ceux qui ont des “compétences supérieures en matière de reconnaissance faciale“. Ce sont des “super-profilers”, ou des personnes ayant une capacité supérieure à se souvenir de visages qui, selon une étude de l’Université de Bournemouth, représente 2% de la population. Peut-être que l’intelligence humaine pourrait encore surpasser l’IA quand il s’agit de visages humains !
Billet inspiré de Who’s watching? Face recognition means goodbye to hiding in crowds, sur Sophos nakedsecurity.
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