Demande de visa américain : contrôle des réseaux sociaux exigé !
Reuters a obtenu et publié quatre câbles diplomatiques envoyés par Tillerson à des missions diplomatiques américaines au cours des deux dernières semaines, dont le plus récent a été publié le 17 mars.
Ces messages illustrent la volonté d’effectuer des “vérifications approfondies” concernant les étrangers, comme promis par le président Donald Trump pendant la campagne présidentielle, note Reuters. Transformer ces promesses en réalité sera très difficile : deux anciens responsables américains ont déclaré à l’agence de presse que les contrôles obligatoires se heurteront à des obstacles logistiques et administratifs, car ils nécessiteront une “augmentation significative des effectifs”, afin d’effectuer les vérifications au niveau des médias sociaux, plutôt rares, que les fonctionnaires consulaires réalisent déjà d’ailleurs.
Anne Richard, secrétaire d’État adjoint au sein de l’administration Obama, a déclaré :
Il existe tellement de réseaux sociaux aujourd’hui. Vous ne pouvez pas faire de telles vérifications dans un lapse de temps imposé.
Les avocats liés au sujet de l’immigration ont déclaré à Reuters que l’élargissement de ce screening pourrait également conduire au profilage de toute personne faisant une demande de visa américain sur la base de leur nationalité ou de leur religion, par opposition au réel danger qu’ils pourraient représenter pour les États-Unis.
Jay Gairson, un avocat spécialisé dans les affaires d’immigration basé à Seattle, qui représente des clients de pays concernés par l’interdiction de voyage de Trump, a déclaré :
La plupart des postes [consulaires] effectuent déjà des vérifications concernant une population potentiellement dangereuse d’un point de vue des fraudes et de la sécurité.
Cette nouvelle approche donne aux postes consulaires l’autorisation de se détourner des facteurs ciblés développés et optimisés jusqu’à présent, pour élargir la recherche à de grands groupes en fonction de facteurs moins pertinents tels que la nationalité et la religion.
La série de messages émis montre que Tillerson a dû faire marche arrière car les tribunaux ont bloqué les interdictions de voyage de Trump. Cela comprend une série de questions pour les demandeurs de visa en provenance d’Iran, de Libye, de Somalie, du Soudan, de Syrie et du Yémen, ainsi que des ressortissants de pays identifiés comme présentant des risques pour la sécurité. La première interdiction de voyager de Trump avait inclus l’Irak sur cette liste, mais l’avait exclu après révision.
La nouvelle série de questions de vérification, définies dans un mémo en date du 15 Mars dernier, aurait exigé que tout individu faisant une demande de visa américain fournisse son numéro de passeport antérieur et tous ses numéros de téléphone, adresses emails et identifiants utilisés sur les réseaux sociaux au cours des cinq dernière années.
Les câbles diplomatiques du 16 Mars et du 17 Mars de Tillerson ont déclaré aux postes consulaires de ne pas tenir compte de ces questions, dans l’attente de l’approbation de l’OMB (Office of Management and Budget).
Mais, malgré le rétropédalage concernant ces questions, le mémo de Tillerson a conservé l’exigence d’un “contrôle obligatoire des réseaux sociaux pour toute personne faisant une demande de visa américain, et ayant été présents sur un territoire au moment où il était contrôlé par l’[IS]».
Si le poste détermine que le demandeur peut avoir eu des liens avec l’[IS] ou d’autres organisations terroristes, ou bien qu’il a déjà été présent dans un territoire contrôlé par l’[IS], le poste doit renvoyer le demandeur à l’unité de prévention de la fraude, pour un examen obligatoire des réseaux sociaux.
Nous avons déjà vu la CBP (Customs and Border Patrol) américaine exiger l’accès aux comptes des réseaux sociaux de voyageurs. Selon l’AILA (American Immigration Lawyers Association), les agents frontaliers le font depuis plusieurs années, malgré les doutes sur une éventuelle violation de la constitution.
Bien que ces vérifications semblent avoir nettement augmenté dans les heures qui ont suivi l’interdiction initiale de voyage de Trump, il semblerait qu’elles soient toujours faites ad hoc, au cas par cas, comme si les agents n’avaient pas reçu beaucoup de directives. Le mémo du 17 mars de Tillerson fournit apparemment un début de cadre pour les demandes concernant les comptes sur les réseaux sociaux.
En Juin 2016, l’agence de la douane et de la protection des frontières (CBP) du ministère de la Sécurité intérieure (DHS) a mis au point un plan pour recueillir les détails des réseaux sociaux des voyageurs : un plan qui a été promulgué discrètement en décembre dernier, malgré les critiques acerbes des géants de la technologie et des défenseurs des droits humains et civils.
Le programme du CBP était censé être optionnel, par opposition à obligatoire, mais comme les critiques l’ont souligné à l’époque, peu de voyageur savaient qu’ils avaient le droit de refuser une telle demande. Ils n’auront certainement pas non plus l’audace de nier quoi que ce soit face aux fonctionnaires américains qui ont leur sort entre leurs mains.
Maintenant, au moins, si vous êtes sur le point de faire une demande de visa américain, et que vous avez voyagé dans l’un des six pays listés par la Maison-Blanche, nécessitant une vérification approfondie, la réponse est la suivante : c’est obligatoire … au moins, jusqu’à ce que la bataille judiciaire en cours n’ait livrée ces conclusions.
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Billet inspiré de US to make social media checks compulsory for some visas, par Lisa Vaas, Sophos NakedSecurity.